• Les directeurs juridiques étendent leur sphère d’influence

    Les directeurs juridiques étendent

    leur sphère d’influence

    Vincent Bouquet | Le 08/06/2016 à 19:00     LIEN
     
    Les juristes éprouvent autant difficultés franchir porte conseils d’administration.
     
    • Les juristes éprouvent toujours autant de difficultés à franchir la porte des conseils d’administration. - Shutterstock / fotogestoeber

    Tendance Plus internationaux, en majorité rattachés à leur direction générale, les directeurs juridiques élargissent leur champ d’action au-delà de leur périmètre traditionnel, selon la Cartographie des directions juridiques 2016 réalisée par Lexqi Conseil.

    « Se connaître pour se défendre ». En feuilletant la cinquième édition de la Cartographie des directions juridiques (1) mise au point par le cabinet Lexqi Conseil, le directeur juridique d’Orange et président du Cercle Montesquieu, Nicolas Guérin, avoue d’emblée qu’il s’en sert comme d’un outil très opérationnel. « Ce panorama de la profession est très utile pour montrer l’étendue de notre action, y compris en interne, auprès du directeur financier, quand vient l’heure de discuter de nos budgets », souligne-t-il. Dans les grandes lignes, cette mouture 2016 vient confirmer les tendances majeures détectées lors de la précédente enquête, réalisée il y a deux ans .

    Plus internationaux – 76 % des directeurs juridiques interrogés ont un périmètre d’intervention qui va au-delà de la France, contre 69 % en 2014 –, les directeurs juridiques sont aussi de plus en plus souvent hiérarchiquement rattachés à leur direction générale (56 %, contre 54 % en 2012 et 47 % en 2010). « Pour nous, c’est une vraie satisfaction, se réjouit le directeur juridique et secrétaire du Conseil d’AccorHotels, François Pinon, également administrateur de l'AFJE. Il s’agit moins d’une question statutaire que d’une capacité du juriste à évoluer dans un environnement qui lui permet de donner des opinions en toute indépendance. Ce gage est encore plus important quand sont abordés des points de conformité car il est capital, dans ce cadre, que la direction juridique puisse avoir une certaine assise pour que les avis rendus soient le plus pertinent possible ».

    Une stratégie de conquête

    Majoritairement présents dans un comité de direction de leur entreprise (63 %), dont un peu moins de la moitié (47 %) directement au Comex ou au Codir, les juristes éprouvent toujours autant de difficultés à franchir la porte des conseils d’administration. Ils ne sont qu’un peu plus d’un tiers à avoir un mandat d’administrateur de sociétés et, parmi ces derniers, une très large majorité sont administrateurs d’une ou plusieurs filiales du groupe qui les emploie. « Quand on constate que seulement 6 % des directeurs juridiques sont administrateurs de sociétés en dehors de leur groupe, on peut légitimement se dire qu’ils ont une grande marge de progression en la matière », affirme Hélène Trink, fondatrice de Lexqi Conseil et responsable de cette étude.

    Pour autant, le champ d’action des directeurs juridiques tend à s’élargir. S’ils n’étaient que 52 % à prendre en charge le secrétariat du Conseil en 2014, ils sont désormais 65 %. Idem pour les questions de conformité, d’éthique et de compliance dont 66 % disent s’être emparées, contre 63 % il y a deux ans. « Pour nous, il s’agit de transformer ces questions en des facteurs d’agilité permettant de dire quand et où se développer, note François Pinon. Chez AccorHotels, ils ont par exemple été essentiels lorsque nous avons décidé d’ouvrir des hôtels en Iran ».

    Toutefois, il subsiste deux pôles de résistance à cette stratégie de conquête : le droit social et le droit fiscal qui ne sont rattachés respectivement que dans 22 % et 11 % des cas au directeur juridique. « Il y a effectivement des progrès à faire sur ce point, concède le directeur juridique d’Orange. Si le second est traditionnellement, et logiquement, rattaché à la direction financière, le premier pourrait être utilement rapproché des juristes et détaché des ressources humaines afin de tendre vers plus d’harmonisation au sein des entreprises ».

    Partie prenante des projets numériques

    Mais, non contents d’intervenir largement en matière de contract management (70 %), dont 7 directeurs juridiques sur 10 anticipent qu’il représentera un axe de développement important dans les années à venir, ou d’être le pôle de rattachement principal (33 %) des « compliance officers », les juristes gagnent progressivement des galons dans les projets numériques lancés dans leurs entreprises. Ainsi, si leur société dispose d’un projet Big Data, ils sont 88 % à s’y impliquer, idem pour la veille relative aux « technologies de rupture » qui occupe plus d’un directeur juridique sur deux (53 %).

    Quant à la réflexion sur la mise en œuvre du nouveau règlement européen concernant la gestion des données personnelles – «  un chantier important, eu égard aux efforts de sensibilisation et de formation que les entreprises devront déployer sur ce sujet en interne » note Myria Saarinen, avocate associée chez Latham & Watkins –, elle est, lorsqu’elle est déjà initiée comme dans 2/3 des entreprises interrogées, majoritairement chapeautée par la direction juridique. « Tous ces projets sont passionnants pour nos équipes car ils rendent les juristes très opérationnels, assure le directeur juridique d’AccorHotels. Il ne s’agit pas pour eux de dire "oui" ou "non" en restant en marge du business mais de s’y impliquer très concrètement en montrant la voie juridique qu’il est possible d’emprunter ».

    Budget et effectifs en hausse

    Pour gérer cette pluralité de missions, les directeurs juridiques peuvent compter sur un budget en très légère augmentation (0,18 % du chiffre d’affaires en 2015, contre 0,17 % en 2011 et 2013) et surtout sur des équipes de juristes plus étoffées : s’ils étaient 7 juristes, en moyenne, par milliard d’euros de chiffre d’affaires, ils sont désormais 7,9. Et cette augmentation des effectifs en interne ne se fait pas, à en croire l’étude, au détriment des partenaires externes qui engrangent encore 39 % du budget total moyen des directions juridiques interrogées, contre 40 % en 2013. « Cette double dynamique nous la devons aux indicateurs de performance que de nombreuses directions juridiques ont mis en place, affirme Nicolas Guérin. En chiffrant le nombre de consultations, de contrats ou encore les gains réalisés, ils permettent aux juristes d’être plus efficients, de mieux se faire comprendre en interne, d’être perçus comme un centre de profit et donc de mieux faire valoir leur travail ».

    Surtout, les outils informatiques dont se sont dotées la plupart des directions juridiques – notamment pour avoir accès à une documentation juridique « online » (59 %), pour assurer la gestion et le suivi des filiales et participations (52 %), ou encore pour gérer et suivre les contrats (52 %) – leur permettent de réduire le nombre de leurs assistants para-légaux (25 % de l’effectif total du service juridique en 2011, et seulement 17 % en 2015) au profit des juristes. Et les directeurs juridiques ne comptent pas s’arrêter là. S’ils disposaient d’un budget supplémentaire en 2016, ils affirment qu’ils recruteraient en priorité un juriste, avant d’augmenter les salaires de leurs équipes, ou de recruter un assistant juridique. « Car l’investissement en ressources juridiques le plus pertinent reste, avant tout, l’investissement humain », conclut François Pinon.

    (1) – En partenariat avec le Cercle Montesquieu et l’Association française des juristes d’entreprise (AFJE), et avec le parrainage de Latham & Watkins et LexisNexis. 179 directeurs juridiques ont répondu à l’appel de leur(s) association(s) et, parmi eux, 127 (71 %) ont choisi de répondre à l’ensemble de l’enquête réalisée par voie électronique entre le 8 et le 28 mars 2016. Les participants représentent des entreprises qui comptent 3.500 juristes en France – soit plus de 20 % de l’effectif de la profession – et 6.500 juristes au total dans le monde.

    Portrait du juriste-type
    - En 2016, 82 % des directions juridiques ont un effectif de juristes majoritairement féminin sur l’ensemble de leur périmètre, contre 70 % en 2013.
    - 60 % des juristes France exerçant dans les sociétés interrogées ont plus de 7 ans d’expérience professionnelle.
    - 28 % des directions juridiques ont plus d’un quart de leur effectif de juristes France titulaires du CAPA, contre 21 % en 2012.
    - 27 % des directions juridiques ont plus d’un quart de leur effectif de juristes France titulaires d’un diplôme juridique étranger.
    - 15 % des directions juridiques ont plus d’un quart de leur effectif de juristes France ayant un double cursus (droit et autre domaine).

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