• L’agence Associated Press soupçonnée d’avoir coopéré avec le régime nazi

    L’agence Associated Press soupçonnée d’avoir coopéré avec le régime nazi

     
    Un journal britannique de l'année 1939 /Flickr aimee rivers

    Un journal britannique de l'année 1939. Flickr aimee rivers

    L'agence de presse américaine Associated Press a-t-elle coopéré avec le régime nazi ? Une étude publiée par la revue d'histoire Studies in Contemporary Historyrelayée par le Guardian, soulève plusieurs questions sur la présence de l'agence en Allemagne entre 1933 et 1941.

    Associated Press (AP) a pu travailler en Allemagne longtemps après le départ du Guardian en 1934 et celui des agences anglo-saxonnes Keystone et Wide World Photos, interdites en 1935 parce qu'elles employaient des journalistes juifs. AP n'a quitté l'Allemagne qu'en 1941, lors de l'entrée en guerre des Etats-Unis.

    D'après l'historienne allemande Harriet Scharnberg, professeure à l'université Martin Luther, l'agence a pu conserver ses accès en Allemagne nazie grâce à une sorte d'arrangement avec le régime. AP a souscrit à la Schriftleitergesetz, une sorte de charte éditoriale engageant les médias à ne pas publier de contenus "destinés à affaiblir la puissance du Reich à l'étranger ou sur son territoire". 

    Selon cet accord, l'agence AP devait employer des journalistes qui travaillaient également pour la propagande nazie. Selon Harriet Scharnberg, l'un des quatre photographes d'AP en Allemagne, Franz Roth, était également membre de la section de propagande des SS.

    Des photos de l'agence AP dans la propagande nazie

    AP a autorisé le régime nazi à utiliser ses archives photographiques à des fins de propagande. La brochure Der Untermensch ("Les sous-humains") est illustrée par une image d'AP. Le livret antisémite Des juifs aux Etats-Unis montre en couverture le maire de New York Fiorello LaGuardia (Américain d'origine italienne dont la mère était juive) en train de manger. Une image AP utilisée par le régime pour démontrer la "décadence" des juifs américains...

    La couverture de la brochure de propagande "Die Juden in USA", "Les juifs aux Etats-Unis". Photographie de Fiorello LaGuardia par l'agence AP.

    La couverture d'une brochure de propagande antisémite "Die Juden in USA", "Les juifs aux Etats-Unis". Photographie de Fiorello LaGuardia par l'agence AP.

    L'agence a-t-elle permis au reste du monde d'obtenir de précieuses informations sur un régime répressif, où toute publication était contrôlée et où les médias indépendants étaient systématiquement muselés ? A-t-elle au contraire contribué à minimiser les premiers crimes de l'Allemagne nazie ? Selon l'historienne Harriet Scharnberg, la coopération d'AP avec le régime a contribué à faire passer "une guerre d'extermination pour une guerre conventionnelle". 

    L'exemple des massacres de Lviv

    En juin 1941, les troupes du régime nazi ont envahi la ville de Lviv, dans l'ouest de l'Ukraine, et ont "vengé" les massacres des troupes soviétiques par des pogroms contre la population juive. Les photographies de Franz Roth pour AP, montrant des corps dans les prisons de Lviv, ont été sélectionnées selon les ordres de Hitler et distribuées à la presse américaine via AP.

    "Au lieu d'imprimer des photos des pogroms de Lviv, et de leurs centaines de victimes juives, la presse américaine ne s'est vue offrir que des photographies de victimes de la police soviétique et des criminels de guerre de l'Armée rouge", explique Harriet Scharnberg au Guardian"Dans cette mesure, il est juste de dire que ces photos ont joué un rôle dans le projet de déguiser la véritable nature de la guerre menée par les Allemands", ajoute l'historienne.

    "Le choix des événements qui devenaient visibles et de ceux qui restaient cachés à partir des photos d'AP était fait dans l'intérêt de l'Allemagne et de la version allemande de la guerre."

    L'agence nie toute "collaboration"

    L'agence de presse a déclaré dans un communiqué que l'article de l'historienne "décrit des personnes et des activités inconnues de l'agence AP".  Dans un e-mail envoyé au New York Times, le porte-parole d'AP précise que le nom de Franz Roth, le photographe employé de l'agence et membre de la section de propagande des SS, est "inconnu des archivistes de l'agence".

    Interrogé par le Guardian, un porte-parole de l'agence a précisé qu'AP rejetait la notion de "collaboration délibérée" avec le régime nazi.

    "Il serait plus juste de dire que AP, et d'autres médias étrangers, ont été soumis à une forte pression de la part du régime nazi, entre l'arrivée d'Hitler au pouvoir en 1933 et l'expulsion d'AP hors du pays en 1941."

    Associated Press a assuré que les archives étaient en cours d'investigation pour permettre une "meilleure compréhension de la période."

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