Sylvie Leclerc, une quinquagénaire jugée depuis lundi à Nancy pour avoir tué en 2012 son compagnon d’un coup de fusil, a été condamnée jeudi à neuf ans de prison. Suivant les réquisitions de l’avocate générale, la cour a estimé que le discernement de l’accusée n’avait pas été aboli, mais altéré au moment du meurtre, qu’elle affirmait avoir commis pour se libérer de l’emprise de cet homme.

«Une vie douloureuse et la dépression chronique ont créé chez elle cette impression qu’il n’y avait pas d’autre issue», avait souligné devant la cour d’assises de Meurthe-et-Moselle l’avocate générale Marie-Claude Weiss, précisant qu’elle ne souhaitait pas «ajouter du malheur au malheur, car chez Mme Leclerc, le malheur est tenace et le bonheur est fugace».

«Je l’ai aimé et je l’aime toujours. Il est toujours là. J’ai besoin de lui. Il me manque beaucoup» , avait lancé jeudi Sylvie Leclerc, avant de demander pardon à sa fille Aude, qui lui a répondu : «tu es pardonnée maman !».

«Syndrome de Stockholm»

Pendant ces quatre jours d’audience, l’accusée a été présentée par ses défenseurs comme une nouvelle Jacqueline Sauvage , cette femme devenue un symbole des violences conjugales après sa condamnation en décembre à Blois à 10 ans de réclusion pour le meurtre de son mari violent, mais qui a bénéficié ensuite d’une grâce présidentielle partielle. Défendue par les mêmes avocates que Jacqueline Sauvage, Sylvie Leclerc a tenté d’expliquer devant la cour à quel point il lui était devenu nécessaire de se «libérer» de l’emprise de son compagnon, qu’elle avait abattu dans son lit, d’une balle de fusil tirée à bout portant.

Cet éboueur de 58 ans dont elle a partagé la vie durant 35 ans était selon elle un être «jaloux» et «colérique», qui l’insultait et la forçait à des rapports sexuels longs et douloureux. La propre fille de Sylvie Leclerc et Gérard Schahan, Aude, 27 ans, a déclaré à la cour que sa mère avait «bien fait» de tuer son père, car «c’était la seule issue». «Mon père avait une emprise sur ma mère, sur moi et sur tout son entourage [...] Il me faisait très peur, même s’il ne m’a jamais frappée», a-t-elle ajouté.

Les débats ont toutefois également mis en lumière la relation complexe entre l’accusée et sa victime. Sylvie Leclerc était «davantage prisonnière de sa propre dépendance que de l’emprise objective de son conjoint», a ainsi souligné à la barre un expert psychiatre, le Dr Jacques Henry. Pour un autre expert, le Dr Francis Boquel, l’accusée «a développé le syndrome de l’otage ou syndrome de Stockholm, auquel s’est ajouté un syndrome d’accommodation».

Jeudi, les avocats des parties civiles ont déploré que Sylvie Leclerc cherche à salir la mémoire de son compagnon pour expliquer son geste.