-
Primaire de la droite : 10 228 bureaux de vote stratégiquement répartis
LE MONDE | 30.09.2016 à 06h46 • Mis à jour le 30.09.2016 à 11h57 | Par Jérémie Baruch, Alexandre Lemarié et Matthieu Goar
-
La clé de répartition
Avec 10 228 bureaux, la droite fait aujourd’hui mieux que la primaire du Parti socialiste (PS) et du Parti radical de gauche (PRG) en 2011 (9 425). Pour avoir plus de lieux de vote là où les électeurs de droite sont nombreux, le comité d’organisation du scrutin a mis en place une clé de répartition dès l’été 2015.
Celle-ci repose sur les scores cumulés de Nicolas Sarkozy, de François Bayrou (Mouvement démocrate, MoDem) et de Nicolas Dupont-Aignan (Debout la République) au premier tour de l’élection présidentielle de 2012. Les circonscriptions où ces trois candidats ont eu les meilleurs résultats sont les mieux loties. L’équipe de M. Sarkozy avait tenté de faire plutôt prendre en compte sa performance au second tour, ce qui aurait permis de minorer l’influence des voix centristes. Mais les autres candidats n’ont pas accepté.
Sans surprise, les départements les mieux dotés sont ceux qui cumulent le plus grand nombre de circonscriptions ayant enregistré un fort vote en faveur de la droite et du centre à la présidentielle de 2012 (en haut du palmarès, le Nord, 364 bureaux, Paris, 313, et les Bouches-du-Rhône, 313). Près de la moitié des bureaux – soit 4 706 – se situent ainsi dans quatre régions : les Hauts-de-France, l’Ile-de-France, Auvergne-Rhône-Alpes et Provence-Alpe-Côte d’Azur.
Le comité d’organisation a délégué aux comités d’organisation départementaux la mission de dénicher les lieux de vote. Près de 50 % se situent dans des mairies ou dans des écoles, comme lors des élections traditionnelles. A Mulhouse (Haut-Rhin), le Parc Expo en abritera pas moins de vingt et un tandis que des permanences parlementaires sont aussi mises à contribution à Firminy (Loire) ou à Turckheim (Haut-Rhin).
Certains endroits sont payants. La Haute Autorité a, par exemple, dû dépenser plus de 300 000 euros pour les 313 bureaux parisiens. Une fois les salles trouvées, il a fallu répartir les noms de tous les citoyens français en âge de voter – environ 45 millions – en rattachant chacun au bureau le plus proche.
« L’idée est que les gens n’aient jamais à faire plus d’une heure aller-retour en voiture pour voter », résume le député (Les Républicains, LR) des Hauts-de-Seine, Thierry Solère, président du comité d’organisation. Si le maillage urbain est très dense, les zones rurales ne sont pas délaissées. Environ 1 000 bureaux ont été réservés pour venir combler les vides dans les territoires peu denses.
-
L’enjeu de la participation
La droite espère profiter du contexte politique – rejet de François Hollande, primaire avec des personnalités connues – pour attirer plus de monde que la gauche en 2011 (2,66 millions d’électeurs au premier tour, 2,86 millions au second tour).
Dans ces conditions, l’enjeu est d’éviter les files d’attente constatées lors de l’élection à la présidence de l’UMP entre Jean-François Copé et François Fillon en 2012.
En fonction des départements, entre 3 000 et 5 500 Français sont rattachés en moyenne à chaque bureau de vote. Si l’on se fie aux sondages les plus optimistes, 10 % des Français se disent intéressés par cette primaire, ce qui voudrait dire que les bureaux devront être en capacité d’accueillir entre 300 et 550 personnes dans la journée. Une jauge tout à fait gérable, selon les responsables. « Si l’on a des files d’attente, cela voudra dire que la participation est exceptionnelle », estime M. Solère.
Pour accueillir ce public, le comité d’organisation a déjà choisi les 10 228 présidents des bureaux sur la base du volontariat. Ils seront assistés par un minimum de trois assesseurs et parfois plus. La droite pense pourvoir mettre entre 50 000 et 60 000 bénévoles à contribution. En plus de l’émargement, ils devront faire signer la charte d’adhésion aux valeurs de la droite et du centre et faire payer 2 euros à chaque votant. Un processus plus long que les opérations de vote classique.
-
Les zones de force des candidats
Si l’on projette cette carte électorale de la primaire sur la géographie électorale des dernières élections, les deux principaux candidats, Alain Juppé et Nicolas Sarkozy, ont déjà dans le viseur des zones où ils doivent faire le plein de voix. Le maire de Bordeaux mène une campagne d’ouverture au centre. L’arc atlantique, de la Bretagne – de tradition démocrate-chrétienne –, au Sud-Ouest, sa région et celle de son allié François Bayrou, lui offre sans doute un réservoir important.
Nicolas Sarkozy mène, lui, une campagne identitaire. Il espère reconquérir les électeurs partis au Front national en 2012. Le Nord, l’Est et le Sud-Est de la France sont donc des terres de reconquête. L’ancien président de la République fait d’ailleurs la majorité de ses déplacements dans ces zones. Au-delà de la clarification idéologique, la primaire actera aussi sans doute une séparation géographique entre l’Ouest plus modéré et l’Est plus radicalisé.
- Matthieu Goar
Journaliste au Monde Suivre Aller sur la page de ce journaliste
votre commentaire -
-
Jean Ping sur RFI: Ali Bongo «procède à un hold-up militaro-électoral» au Gabon
Le leader de l'opposition gabonaise Jean Ping, lors d'une conférence de presse, deux jours après la réélection d'Ali Bongo, le 2 septembre 2016. STEVE JORDAN / AFPAu lendemain de la présidentielle du 27 août, le Gabon est confronté à une crise post-électorale. Jean Ping a demandé jeudi 29 septembre à la communauté internationale de « prendre des sanctions ciblées » contre les responsables de ce qu'il appelle un « coup d'Etat militaro-électoral », réaffirmant qu'il ne « reconnaîtrait pas le pouvoir d'Ali Bongo ». Jean Ping sort de son silence. Est-il « KO debout » ? A-t-il cru réellement pouvoir accéder au fauteuil suprême ? Quel va être sa stratégie désormais ? Quelles initiatives va-t-il prendre ? A toutes ces questions, Jean Ping répond ce matin.
RFI : Certains vous disent KO, sonné. Dans quel état d’esprit êtes-vous ? KO ou combatif ?
Jean Ping : Je ne peux pas être KO. On ne peut pas être KO quand on sait qu’on a le peuple avec soi, le droit avec soi et la communauté internationale avec soi. On ne peut pas être KO.
Vous appelez chacun à la résistance active, c’est-à-dire ? Des grèves nationales ? Des journées « ville morte » ? Des marches ? Qu'est-ce que cela veut dire ?
Ça veut dire, tout simplement, que nous avons en face de nous quelqu’un qui a usurpé les résultats des élections, qui a fait un coup d’Etat militaro-électoral, qui a pris le pouvoir, qui veut le conserver encore sept ans. Ça veut dire 57 ans de pouvoir. Et ils utilisent tous les moyens pour y arriver. Et je crois que, cette fois-ci, le peuple ne veut plus de ça.Le nouveau Premier ministre Issoze-Ngondet a annoncé la formation d’un gouvernement d’ouverture, en direction des partis et de la société civile. Ne craignez-vous pas qu’il débauche certains qui vous ont rallié ?
Oh, mais c’est certain, c’est certain ! Ça se passe toujours comme ça, ici comme chez vous ! Ça se passe toujours comme ça. Il va à la pêche, il va « pêcher » les gens. Nous le savions depuis le départ. Il n’y a rien d’étonnant à cela.
Aujourd’hui, vous dites quoi ? « Je suis le président, le mandat d’Ali Bongo va s’achever » ? Ne placez-vous pas ainsi le Gabon dans une impasse totale ?
Non. Moi, je ne place pas le Gabon dans une impasse totale. C’est lui qui place le Gabon dans une impasse totale. Il n’a pas gagné les élections, il le sait. Il procède à un « hold-up » militaro-électoral, il cherche à se faire légitimer par tous les moyens, voilà.
Vous annoncez organiser un dialogue inclusif. Avec qui ? C’est-à-dire ?
C’est simple : le dialogue est quelque chose qu’on ne peut pas négliger. Surtout lorsque le pays traverse une crise aussi grave. Je pense simplement que le dialogue doit être organisé par celui qui a gagné les élections, avec tous les Gabonais. Pas par celui qui n’a pas gagné et qui cherche un dialogue juste pour se faire légitimer ! Et de surcroît, il vous appelle au dialogue revolver sur la tempe, les Mirage qui terrorisent les populations à basse altitude, les hélicoptères d’attaque, les emprisonnements, les tueries... Est-ce un dialogue, ça ? Ce n’est pas un dialogue !
Diriez-vous qu’Ali Bongo ne tient pas compte de vos 47 % de voix ?
Ali Bongo ne tient pas compte de ma victoire ! Quels 47 % des voix ? Les 47 % des voix qu’il a annoncés et préfabriqués ? Vous connaissez la vérité ! Donc, ne nous dites pas des choses qui sont contraires à la vérité.
Ecartez-vous toute violence, M. Jean Ping ?
La violence est pratiquée par Ali, pas par nous ! Vous étiez ici à Libreville. Les avions à réaction qui volent à basse altitude, c’est contre qui ? Les hélicoptères d’attaque, c’est contre qui ? Les arrestations arbitraires, c’est contre qui ? Les morts qui ne cessent de s’accumuler, c’est contre qui ? Il y a une volée de violence disproportionnée de l’Etat. Nous, nous n’avons tué personne, nous n’avons pas d’armes.
Aviez-vous pensé sincèrement, à un moment donné, pouvoir gagner l’élection et qu’Ali Bongo quitterait le pouvoir ?Bon, nous l’avons réellement pensé. Nous avons pensé que, pour une fois, il pourrait céder à la volonté populaire unanime. Mais nous connaissons l’homme. Il a voulu en 1985 se faire proclamer prince héritier, faire passer le président Bongo pour un roi. Et il est dans cette posture. Il pense qu’il va régner à perpétuité sur le Gabon et, après lui, ce sera son fils. Mais on n’entre pas au XXIe siècle à reculons. Tous ceux qui ont tenté de jouer à ce jeu-là ont fini par perdre. Qu’ils s’appellent Idi Amin Dada ou tout ce que vous voulez.
La communauté internationale vous a conseillé lourdement de déposer des recours devant la Cour constitutionnelle. Vous l’avez fait. Le regrettez-vous aujourd’hui ?
Oui et non. Non, parce que si nous ne l’avions pas fait, la communauté internationale nous aurait accusés de ceci ou de cela, de ne pas vouloir respecter les règles. Nous l’avons donc fait en pensant que la communauté internationale jouerait à son tour son rôle. Et ça n’a pas été le cas. Nous pensons que la communauté internationale doit maintenant jouer son rôle.Diriez-vous que vous avez été dupe à un moment donné ?
Non, je viens de vous dire ! Dupe, ce n’est pas le mot qui convient. La communauté internationale nous a forcé la main en nous disant : cette fois-ci, ça pourrait bien se passer. Nous avons dit oui, parce que les communiqués de la communauté internationale sont clairs, les engagements pris étaient clairs. L’Union européenne a fait tout ce qu’elle pouvait et, malheureusement, ce que nous craignions est arrivé ! Nous, qui connaissons ces gens et nous, qui avons dit que la Cour constitutionnelle, c’est la tour de Pise qui penche toujours du même côté.Je retire le mot « dupe ». Pourrait-on dire que vous avez été à un moment donné ou que vous êtes aujourd’hui – pardonnez-moi l’expression – le « dindon de la farce » ?
Vous pouvez employer tous les mots que vous voulez, vous pouvez employer tous les mots que vous voulez... Nous savons simplement que la direction qu’on nous a demandé de prendre n’était pas la bonne. Nous avons fait ce qu’on nous demandait de faire. Aux autres de faire ce qu’ils ont promis de faire.
Le Gabon se réveille coupé en deux ?
Non, le Gabon n’est pas coupé en deux ! Le Gabon, c’est le Gabon, avec une bande de voyous qui ont pris le Gabon en otage. Et la population gabonaise dans son ensemble est en danger. Elle appelle la communauté internationale à une assistance à population en danger. Voilà, c’est clair.
votre commentaire -
Daech en Irak : les inconnues de la bataille
de Mossoul
Les forces irakiennes se préparant à la bataille de Mossoul. ((Laurence Geai/SIPA))
Après avoir reconquis de vastes pans de territoire depuis deux ans, les forces irakiennes se préparent à reconquérir cette ville du nord du pays avec l'appui de la coalition internationale. L'heure est à la mobilisation, avant de lancer l'assaut-clé.
Sarah DiffalahPublié le 30 septembre 2016 à 18h08 LIEN
L'opération reconquête de Mossoul, aux mains de l'Etat islamique (EI) depuis août 2014, s'est accélérée vendredi 30 septembre avec l'envoi par la France de huit avions de chasse Rafale en Irak. Cette manœuvre militaire intervient quelques jours après la décision de Barack Obama d'envoyer 615 soldats américains supplémentaires spécialisés dans le renseignement, qui aideront les Irakiens.
Fin août, la ville clé de Qayyarah et sa base aérienne, dernier rempart avant Mossoul à 60 kilomètres au nord, est tombée. Elle sert désormais de base arrière pour l'offensive finale. Mossoul est encerclée. Les raids aériens se sont intensifiés, les forces de sécurité irakienne (FSI), les forces kurdes (peshmergas) et les milices locales qui combattent au sol ont reçu récemment, de la part des Occidentaux, des armes et des pièces d'artillerie pour combattre les djihadistes.
ISF : forces de sécurité irakienne / ISIS : groupe Etat islamique
La dernière bataille semble imminente. Le président américain a estimé, la semaine dernière, que l'offensive pourrait être lancée "assez rapidement". Plusieurs responsables occidentaux ont évoqué le mois d'octobre. On prête à Barack Obama le désir d'accomplir cette mission avant la fin de son mandat en janvier 2017.
Depuis janvier, la coalition internationale a concentré ses efforts militaires sur les "centres de pouvoir" de l'EI : Raqqa en Syrie et Mossoul en Irak, capitales auto-proclamées du groupe djihadiste. En Irak, reprendre Mossoul, la plus grande ville sunnite du pays, a toujours été considéré comme une priorité. L'offensive déstabiliserait durablement le groupe djihadiste. Plusieurs fois programmée, elle a été jusqu'à présent sans cesse repoussée.
Une bataille longue
Mais cette bataille finale risque de durer plusieurs mois. Pour plusieurs raisons. D'abord, Mossoul est une grande ville, avec un nombre important d'habitants (2 millions). Ensuite, l'EI y tient particulièrement : c'est en Irak que le groupe est né et il y a investi beaucoup de moyens. C'est là encore qu'Abou Bakr al-Baghdadi a fait sa première apparition dans une mosquée en tant que "calife".
Les djihadistes de Mossoul, entre 3.000 et 4.500 d'après les estimations du Pentagone, n'abandonneront pas facilement. Les combats risquent d'être féroces et destructeurs. Le défi est d'autant plus difficile à relever que les Occidentaux n'enverront pas de troupes au sol, se contentant d'appuyer les forces locales. Interrogé il y a quelques mois, Vincent Desportes, professeur à Sciences-Po, ancien directeur de l'Ecole de guerre, expliquait :
"En ville nous ne pouvons pas frapper partout. L'ennemi a appris à contourner la menace de la puissance aérienne, en se fondant dans la population, et c'est pour cela que le rendement est relativement limité. On ne peut pas écraser les populations sous les bombes pour les aider. Il est clair que nous ne pouvons libérer une ville que par des combats au sol."
En finir avec Daech en Irak
Les enjeux sont énormes. Libérer Mossoul, c'est avant tout libérer les civils qui vivent sous le drapeau noir de l'EI depuis deux ans. C'est aussi détruire l'EI en tant que territoire. La prise de Mossoul marquerait le démantèlement des structures "étatiques" mises en place : collecte de l'impôt, application de la charia, administration, tribunaux, vente du pétrole et des ressources naturelles... L'embryon d'Etat sera brisé. Tout comme cette image d'invincibilité et de résistance que véhicule la propagande. Sa capacité d'attraction s'en trouverait réduite.
Qui succédera à Daech, une fois Mossoul libéré ?
Mais cela ne signifierait pas pour autant la fin de l'insurrection de l'EI, qui devrait rester actif dans les campagnes ou en perpétrant des attentats. La libération de Mossoul ne signifierait pas non plus la fin de l'idéologie djihadiste, en Irak et ailleurs.
Gérer le jour d'après
Pour espérer l'emporter, la force militaire devra se coupler d'un indispensable règlement politique et diplomatique. En juillet dernier, le représentant spécial du Secrétaire général de l'ONU pour l'Irak, Jab Kubis, a appelé la communauté internationale à anticiper politiquement la libération de Mossoul. Il a souligné l'urgence de mettre l'accent sur la réconciliation "pour que la période de l'après-Daech de l'histoire irakienne soit plus stable, plus sûre et plus prospère que par le passé."
L'EI a pris sa greffe dans la révolte des sunnites contre l'oppression des chiites au pouvoir. Il s'agit donc, à Mossoul, de savoir qui contrôlera la ville demain. Quelle sera l'autorité légitime ? Quelle reconstruction pour permettre aux civils de revenir ? Quelle formule politique ? Logiquement, il faudra redonner le pouvoir aux responsables locaux sunnites, sans quoi les violences reprendront de plus belle. Le gouvernement irakien a pour l'instant du mal à répondre à ces interrogations.
Eviter les représailles
Gérer le jour d'après, c'est aussi éviter les règlements de compte au lendemain de la libération. Human Right Watch a accusé les milices chiites d'exactions envers les civils à majorité sunnite à Fallouja après sa libération. La répétition d'un tel scénario contribuerait à exacerber les tensions confessionnelles sur lesquelles l'EI avait grandi.
Les populations arabes ne voient pas non plus forcément d'un bon œil l'arrivée des Kurdes, qui composent une partie essentielle et indispensable des troupes qui combattent. Si ces derniers ont assuré qu'ils ne resteront pas à Mossoul, la méfiance reste de mise. En janvier, Amnesty International alertait sur les exactions commises par les peshmergas et les milices kurdes dans des villages arabes du nord du pays, libérés et contrôlés par les combattants des unités du gouvernement du Kurdistan. L'organisation internationale avait alors dénoncé des "destructions de masse délibérées". Ils "ont passé au bulldozer, fait exploser et réduit en cendres des milliers de logements dans le but semble-t-il de déraciner les populations arabes, en représailles contre leur soutien supposé", à l'EI, selon l'enquête d'Amnesty qui a insisté :
"Cela s'inscrit dans une volonté de rectifier les abus du passé commis par le régime de Saddam Hussein qui avait déplacé de force des Kurdes, puis installé des Arabes dans la région."
Pour éviter les abus, il est question que les forces kurdes et chiites n'entrent pas dans la ville. Reste que l'armée irakienne est elle aussi perçue par les sunnites comme une armée chiite.
L'inconnue kurde
Les populations sunnites qui peuplent Mossoul redoutent que les Kurdes tirent profit de la situation pour étendre leur territoire dans la zone disputée entre le pouvoir irakien et les Kurdes. En visite à Paris, notamment pour évoquer la bataille de Mossoul avec le ministre de la Défense, Jean-Yves le Drian, le président du gouvernement régional du Kurdistan irakien (GRK), Massoud Barzani, a indiqué que sans accord avec Bagdad, il ne pouvait y avoir de bataille de Mossoul. Dans une interview au "Monde", Massoud Barzani a prévenu à propos des zones disputées et libérées par les Kurdes :
"Il nous faut un accord sur ce point. Les peshmergas sont présents pour protéger les populations, donc il n'y a pas besoin que les forces irakiennes se déploient."
Il propose un référendum dans les zones contestées pour que les populations se prononcent sur leur rattachement au Kurdistan irakien.
Par ailleurs, les Kurdes sont partie prenante des négociations sur l'administration de la ville de Mossoul et de sa province. Difficile de faire sans eux. Un accord est, dans tous les cas, indispensable, à une victoire totale à Mossoul.
Eviter la faillite humanitaire
L'enjeu humanitaire est immense. Il faudra accueillir des centaines de milliers de réfugiés dans des centres autour de Mossoul. A Fallouja, rien ou presque n'était prêt. 90.000 personnes ont fui les combats et ont pris de court les autorités et les ONG. Auront-ils cette fois anticipé ? "Plus d'un million de personnes pourraient être déplacées lors de la prochaine offensive et nous prévoyons qu'au moins 700.000 auront besoin d'aide, d'abris, de nourriture, d'eau", a dit jeudi le représentant du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) en Irak, Bruno Geddo.
Le HCR a déjà construit des camps en prévision de ce déplacement massif, mais il manque de terrains, de fonds et de temps pour en construire d'autres. Le HCR a prévenu que l'offensive sur Mossoul pourrait provoquer "l'un des pires désastres humains depuis de nombreuses années" si rien n'est fait.
Sarah Diffalah
votre commentaire -
Deutsche Bank devrait payer une amende de 5,4 milliards, le titre rebondit
La première banque allemande perdait près de 8 % à l’ouverture des marchés après des retraits d’une dizaine de hedge funds. L’annonce d’une amende de 5,4 milliards de dollars et non plus de 14 milliards a fait bondir l’action.
La tension sur Deutsche Bank est retombée d'un coup. L'Agence France Presse a annoncé que Deutsche Bank devrait finalement payer une amende de 5,4 milliards de dollars contre 14 milliards réclamés au départ par le Département américain de la Justice (DoJ). L'AFP cite une source proche du dossier. Dans la foulée, le titre s'est envolé de plus de 7% pour flirter avec les 12 euros.
Dans la matinée l'action était tombée comme une pierre: -8% à l'ouverture des marchés et était passée ainsi pour la première fois sous la barre des 10 euros. Ce mouvement faisait suite à une dépêche de Bloomberg jeudi soir selon laquelle dix « hedge funds » ont réduit leur exposition à l'établissement . C'est le signe que certaines contreparties commencent à redouter une défaillance de l'établissement allemand, ce qui les empêcherait de faire compenser leurs transactions ou de récupérer leurs actifs. Dans la soirée, le titre coté à Wall Street -l'ADR de Deutsche Bank - a perdu 8 % en séance.
Le directeur général de l'établissement, John Cryan, rappelait ce vendredi matin dans une lettre aux salariés que « les fondations de la banque sont solides. Il faut faire en sorte que la perception déformée de la banque n'affecte pas nos activités au quotidien. » Et met en garde contre « les forces du marché [qui] sont en action pour saper la confiance en nous ».
« La santé financière de la Deutsche Bank [est] devenue une des principales sources de stress des investisseurs. L'épisode Lehman Brothers et les risques systémiques liés à une hausse des craintes sur un établissement bancaire, tel que la Deutsche Bank, reviennent très rapidement à la mémoire », commentaient ce vendredi matin les analystes d'Aurel BGC. En effet, Lehman Brothers a commencé à vaciller quand des fonds se sont retirés.
Deutsche Bank un nouveau Lehman ?
Mais, rappelle le Wall Street Journal , la banque américaine était beaucoup moins diversifiée que Deutsche Bank et trop dépendante des fonds et du marché du repo pour se financer. De plus, du fait de la réglementation instaurée après la crise de 2008, l'établissement allemand dispose de 220 milliards d'euros de liquidité contre seulement 45 milliards de dollars pour Lehman un mois avant sa faillite retentissante.
Les spéculations autour d'un sauvetage de Deutsche Bank circulent depuis le début de la semaine, ce qui a entraîné le cours de l'établissement en Bourse au plus bas depuis 1983. Selon un article de l'hebdomadaire « Die Zeit », Berlin échafauderait un plan en cas de graves difficultés pour Deutsche Bank. Le ministère allemand des Finances a démenti les informations de l'hebdomadaire. Une aide de l'Etat « n'est pas un sujet pour nous », a martelé mercredi John Cryan, le patron de Deutsche Bank dans une interview à « Bild ». Plus tôt dans le week-end, un article du magazine « Focus » affirmait qu'Angela Merkel avait refusé toute aide d'Etat pour renflouer la banque.
Le président de l'Eurogroupe, Jeroen Dijsselbloem.en a remis une couche ce vendredi. Selon lui, Deutsche Bank doit trouver les moyens de survivre « par elle-même », donc sans le soutien de l'Etat allemand.
votre commentaire -
Donald Trump accusé d’avoir enfreint l’embargo contre Cuba
Le magazine « Newsweek » a publié une enquête affirmant que le candidat républicain avait fait des affaires avec Cuba en 1998.
Le Monde.fr avec AFP | 30.09.2016 à 11h47 • Mis à jour le 30.09.2016 à 14h58 LIEN
Hillary Clinton a accusé, jeudi 29 septembre, Donald Trump d’avoir enfreint l’interdiction de commercer avec Cuba.
« Il a placé ses intérêts personnels et professionnels au-dessus des lois, des valeurs et de la politique des Etats-Unis », a déclaré la candidate démocrate à la Maison Blanche à Chicago aux journalistes qui l’accompagnent. Elle s’appuie sur une enquête de Newsweek faisant état de 68 000 dollars de dépenses par son groupe immobilier sur l’île communiste.
L’argent a été utilisé en 1998, selon Newsweek, par des responsables des hôtels et casinos Trump lors d’un voyage à Cuba, où l’organisation espérait alors s’implanter.
Pour contourner l’interdiction de dépenser de l’argent sur l’île, les fonds sont passés par une société de conseil, Seven Arrows Investment and Development Corp., afin de les faire passer pour des œuvres caritatives.
Comme il l’a expliqué lors du premier débat présidentiel, face à Hillary Clinton, le candidat républicain se sert des lois pour mener ses affaires.
La directrice de campagne de Donald Trump, Kellyanne Conway, a implicitement reconnu que l’embargo avait été violé. « Selon l’article, je comprends qu’ils ont dépensé l’argent en 1998 », a-t-elle dit sur la chaîne ABC (à partir de 2 min 40) en ajoutant que Donald Trump « avait décidé de ne pas investir là-bas » et qu’il restait « très critique » vis-à-vis de Cuba et du régime des frères Castro.
Dans une intervention devant la Cuban American National Foundation, le 15 novembre 1999, l’homme d’affaires déclarait qu’il n’irait à Cuba que lorsque le pays serait libre.
L’embargo commercial américain contre Cuba, mis en place dans les années 1960, reste en vigueur malgré la politique de rapprochement engagée par Barack Obama, en raison de l’opposition de la majorité républicaine au Congrès. Mais Hillary Clinton et Barack Obama sont favorables à sa levée. « J’étais très favorable à l’ouverture lorsque j’étais secrétaire d’Etat, j’ai salué l’initiative du président Obama et je la poursuivrai lorsque je serai présidente », a-t-elle affirmé jeudi.
votre commentaire -
Face à Donald Trump, même les journaux conservateurs choisissent Hillary Clinton
Si le récent appel du "New York Times" à voter pour la candidate démocrate n'est pas une surprise, les prises de position d'autres journaux comme "USA Today" ou de quotidiens locaux plutôt conservateurs ont de quoi étonner.
La candidate démocrate Hillary Clinton, le 29 septembre 2016 à Des Moines (Iowa). (BRENDAN SMIALOWSKI / AFP)
Mis à jour le 30/09/2016 | 14:37
LIEN
publié le 30/09/2016 | 12:51Il y a des soutiens attendus, et d'autres qui le sont beaucoup moins. Si le récent appel du prestigieux New York Times à voter pour Hillary Clinton n'est pas une surprise, les prises de position d'autres journaux comme USA Today ou des quotidiens locaux plutôt conservateurs ont de quoi étonner. A un peu plus d'un mois de l'élection présidentielle américaine, la candidate démocrate engrange les soutiens médiatiques au détriment de son rival Donald Trump.
Le "New York Times" reste fidèle à sa ligne pro-démocrate
"Son engagement de toute une vie pour résoudre les problèmes du monde réel qualifie Hillary Clinton pour cette fonction, et le pays doit la placer aux commandes", écrit le grand quotidien new-yorkais, qui a officialisé son soutien à la candidate démocrate le 24 septembre. Et même si Donald Trump est qualifié dans cet éditorial de "pire candidat présenté par un grand parti dans l'histoire moderne des Etats-Unis", cette prise de position est tout sauf une surprise.
L'édito du New York Times s'inscrit dans une longue tradition de soutien au camp démocrate. Avant Hillary Clinton, le quotidien avait ainsi soutenu Barack Obama en 2012 et 2008, John Kerry en 2004, Al Gore en 2000, Bill Clinton en 1996 et 1992... Le dernier candidat républicain qu'il ait soutenu fut le général Dwight Eisenhower en 1952 puis en 1956.
A l'autre bout du pays, en Californie, le Los Angeles Times a également pris fait et cause pour Hillary Clinton, l'imaginant en présidente "sobre, intelligente et pragmatique", tandis que Donald Trump serait "une catastrophe".
"USA Today" s'engage pour la première fois de son histoire
Fondé en 1982, le quotidien populaire USA Today n'avait, jusqu'à présent, jamais pris partie pour un candidat à la présidentielle. S'il se garde bien d'appeler clairement à voter pour Hillary Clinton, le journal a publié un éditorial cinglant contre Donald Trump.
Dans cet article, la rédaction explique avoir fait exceptionnellement une entorse à son principe car "cette année, l'un des candidats, le républicain Donald Trump, est, de l'avis unanime de l’équipe éditoriale, inapte au poste de président".
Considérant le candidat républicain comme "dangereux", USA Today conclut ainsi son édito : "Quoi que vous fassiez, résistez aux sirènes d'un dangereux démagogue. Quoi qu’il arrive, votez. Mais pas pour Donald Trump."
Des journaux conservateurs soutiennent Hillary Clinton... et perdent des lecteurs
La défiance envers Donald Trump est telle que certains journaux conservateurs, qui soutiennent habituellement le clan républicain, se détournent du milliardaire. Mardi, le quotidien Arizona Republic a annoncé qu'il soutenait la candidature démocrate. Une première depuis sa fondation en 1890.
Le comité éditorial du journal considère que Donald Trump n'est pas qualifié pour être président. Il juge que si Hillary Clinton n'est pas sans défauts, elle est de loin un "meilleur choix". Mais à peine cette déclaration de soutien publiée, des lecteurs en colère ont inondé la rédaction d'e-mails furieux et beaucoup ont même résilié leur abonnement. Le journal a aussi reçu des menaces par téléphone, y compris une menace de mort.
Comme le relève Rolling Stone (en anglais), d'autres quotidiens à tendance républicaine ont également refusé d'appeler à voter Trump. C'est notamment le cas du Cincinnati Enquirer, dans l'Ohio, qui, après près d'un siècle de soutien aux républicains, a écrit la semaine dernière que "Trump est un danger clair et présent pour notre pays".
Le Dallas Morning News a lui aussi rompu avec une tradition vieille de 75 ans pour appeler à voter Clinton, la décrivant comme "la seule candidate sérieuse". Comme l'Arizona Republic, ces deux journaux ont également fait l'objet d'annulations d'abonnement en série.
A lire aussi
- L'Amérique en campagne, J-40 : Clinton et Trump jouent sur leurs atouts
- L'Amérique en campagne, J-41 : Hillary, Donald et la revanche de "Miss Piggy"
- L'Amérique en campagne, J-42 : on refait le débat
- Présidentielle américaine : citée par Hillary Clinton, une Miss Univers prend sa revanche contre Donald Trump
- Présidentielle américaine : léger avantage pour Hillary Clinton dans ce premier débat
votre commentaire -
Adieux du monde à Shimon Peres
mais pas à ses rêves de paix
AFPModifié le 30/09/2016 à 15:38 - Publié le 30/09/2016 à 11:17 | AFP
Le président américain Barack Obama et le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu devant le cercueil de l'ancien président israélien Shimon Peres, le 30 septembre 2016Barack Obama et des dizaines de dirigeants du monde entier ont rendu vendredi à Jérusalem un ultime hommage à l'ancien président israélien Shimon Peres, avec l'espoir que ses rêves de paix avec les Palestiniens ne soient pas enterrés avec lui.
Le cercueil de Shimon Peres a été mis en terre à la mi-journée au cimetière national du mont Herzl à Jérusalem, à quelques mètres d'un autre Nobel de la paix, Yitzhak Rabin.
Les funérailles de M. Peres, mort mercredi à 93 ans, ont constitué un vibrant hommage à la stature de l'un des pères fondateurs de l'Etat d'Israël et des artisans des accords d'Oslo censés tracer la voie de la paix avec les Palestiniens et les Arabes.
La présence du président américain, de ses homologues français ou allemand, du prince Charles, du roi d'Espagne et même du président palestinien Mahmoud Abbas, tous placés sous protection policière maximale, rend compte de l'immense respect que s'était attiré M. Peres en 70 ans de carrière à tous les postes - Premier ministre, ministre de la Défense, des Affaires étrangères, président.
Le président américain Barack Obama prononce l'hommage funèbre de Shimon Peres le 30 septembre 2016 lors de ses obsèques au cimetière du Mont Eerzl à Jérusalem © NICHOLAS KAMM AFPDans son éloge funèbre, M. Obama a salué l'homme qui avait travaillé avec neuf présidents américains avant lui et qui lui rappelait "d'autres géants du XXème siècle que j'ai eu l'honneur de rencontrer". "Des hommes comme Nelson Mandela, des femmes comme sa majesté la reine Elizabeth", des personnalités dont l'existence couvre de telles périodes qu'il parlent "avec profondeur et connaissance, et pas en petites phrases", a souligné M. Obama.
- Un rêve non réalisé -
Mais, en présence du président palestinien et du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, assis au premier rang à distance l'un de l'autre, M. Obama a ouvert son propos par le constat que la paix dont rêvait M. Peres était un "chantier inachevé".
Un petit-fils de Shimon Peres et la garde d'honneur de Knesset devant la tombe de l'ex-président israélien à Jérusalem, le 30 septembre 2016 © ABIR SULTAN POOL/AFPM. Peres était convaincu que la sécurité à laquelle aspire Israël passait par la paix avec les Arabes et les Palestiniens, et la création d'un Etat palestinien, a dit M. Obama. "Bien sûr, alors que nous sommes réunis aujourd'hui, nous savons que Shimon n'a jamais vu se réaliser son rêve de paix", a-t-il ajouté.
La perspective de l'indépendance palestinienne paraît plus éloignée que jamais. Contraint par les circonstances, M. Obama n'a pas développé le propos diplomatique et a conclu en hébreu par "Shalom haver yakar" ("au revoir, ami cher" en hébreu).
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu prononce l'hommage funèbre de Shimon Peres le 30 septembre 2016 lors de ses obsèques au cimetière du Mont Eerzl à Jérusalem © NICHOLAS KAMM AFPAvant M. Obama, M. Netanyahu avait salué en M. Peres, son adversaire d'autrefois, un "grand homme" pour Israël et pour le monde. Mais il avait reconnu que, pour lui, la sécurité passait avant la paix.
"Ses détracteurs lui ont souvent reproché d'être un rêveur naïf et exagérément optimiste", a dit l'ancien président américain Bill Clinton, qui avait présidé en 1993 à la poignée de mains historique des ennemis israéliens et palestinien. "Ils avaient tort seulement en ce qui concerne la naïveté. Il savait exactement ce qu'il faisait en étant exagérément optimiste", a ajouté, ému, celui qui, 21 ans plus tôt, avait assisté au même endroit à l'enterrement d'un autre ami, Yitzhak Rabin.
Le "rêve" de M. Peres était présent sur toutes les bouches, qui louaient aussi son optimisme, son invincible foi dans l'avenir, la jeunesse et l'innovation, son charme et son humour.
Chemi et Yoni Peres, les fils de Shimon Peres, lors de ses obsèques le 30 septembre au cimetière du Mont Erzl à Jérusalem © MENAHEM KAHANA POOL/AFPDans la gravité ambiante, ses enfants ont ressuscité sa malice. L'un de ses fils, Yoni, sur un ton personnel, a fait rire la foule en racontant ce que son père lui disait: "Pour mon éloge funèbre, commence par dire: +il était trop jeune pour mourir+".
- Poignée de mains Abbas-Netanyahu -
Israël n'avait pas connu de tel évènement au moins depuis les funérailles en 1995 d'Yitzhak Rabin, qui avait été récompensé en même temps que Shimon Peres et le leader palestinien Yasser Arafat du Nobel de la paix en 1994. Rabin a été assassiné en 1995, Arafat est mort en 2004.
Capture d'écran d'une vidéo fournie par le porte-parole du Premier ministre israélien, de la poignée de mains entra Mahmoud Abbas et Benjamin Netanyahu lors des obsèques de Shimon Peres le 30 septembre 2016 à Jérusalem © HO Israeli Prime Minister's spokesman/AFPM. Peres, mort mercredi des suites d'un accident vasculaire cérébral, était le dernier survivant des trois récipiendaires du Nobel de la paix 1994 récompensant leur implication dans le premier accord d'Oslo.
Malgré Oslo et la conversion à la paix de cet ancien faucon, les Palestiniens ont une image très sombre de M. Peres, considéré comme un instigateur de la colonisation juive et un homme de guerre et de l'occupation.
Il a fallu la disparition de celui avec lequel il avait négocié les accords d'Oslo pour que M. Abbas effectue sa première apparition publique à Jérusalem depuis des années. A son arrivée, M. Abbas a serré la main et brièvement discuté avec M. Netanyahu. Mais les deux hommes n'ont pas eu d'entretien direct substantiel sur la paix depuis 2010.
Aux yeux des Israéliens, l'image de M. Peres était intimement associée à celle de la nation, de sa naissance à l'accession au rang de puissance régionale au redoutable ascendant militaire. Il était devenu dans son pays une personnalité largement consensuelle, considérée comme un sage de la nation. 50.000 anonymes sont allés se recueillir jeudi devant son cercueil.
30/09/2016 15:37:11 - Jérusalem (AFP) - © 2016 AFP
votre commentaire -
Dans le monde arabe, l’hostilité des peuples et le mutisme des dirigeants après la mort
de Shimon Pérès
Le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, a été le seul président arabe présent aux funérailles vendredi de l’ex-chef d’Etat israélien.
LE MONDE | 30.09.2016 à 13h34 • Mis à jour le 30.09.2016 à 16h02 | Par Benjamin Barthe (Beyrouth, correspondant) LIEN
La cascade d’hommages qu’a suscité dans les pays occidentaux le décès de l’ancien président israélien Shimon Peres, inhumé vendredi 30 septembre à Jérusalem, contraste avec les réactions dans le monde arabe, qui oscillent entre mutisme embarrassé et franche hostilité.
Lire la nécrologie : Shimon Pérès, infatigable avocat d’Israël
Au Liban, la presse, pourtant à couteaux tirés sur la plupart des sujets, a titré de façon quasi-unanime sur la disparition du « boucher de Cana » (Al-Akhbar, quotidien de gauche) ou de « l’assassin de Cana » (An-Nahar, quotidien de droite). Une référence au massacre de 106 civils libanais, dans un village du sud du pays, sous des obus tirés par l’armée israélienne, en 1996, à l’époque où M. Pérès était premier ministre, en représailles à des actions de guérilla du Hezbollah.
L’Orient Le Jour, un quotidien francophone, est revenu en détail sur ce drame, qui éclipse, dans l’esprit de tous les Libanais, l’investissement de l’ex-leader travailliste dans le processus de paix – inabouti – avec les Palestiniens. Le journal, lu par l’élite économique libanaise, a notamment publié un entretien avec Timor Goksel, qui était alors le porte-parole de la Force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul). C’est dans l’une de ses bases, où elles s’étaient réfugiées en pensant être à l’abri, que les victimes de Cana ont trouvé la mort.
Les Israéliens « savaient qu’il n’y avait que des civils et des militaires de la Finul dans la zone. Ils avaient les cartes de la zone. En outre, un drone ainsi que plusieurs hélicoptères israéliens survolaient la zone. (…) Dire que c’était une erreur [comme l’ont fait les autorités israéliennes] n’est qu’un mensonge », assène l’ancien porte-parole des casques bleus.
« Satan sera très heureux
d’accueillir son homologue »Dans le pays du cèdre, l’antagonisme anti-israélien est nourri non seulement par une forme de solidarité avec les Palestiniens, comme dans le reste du monde arabe, mais aussi par le souvenir traumatisant de l’occupation du sud-Liban par Tsahal, entre 1982 et 2000. « Maudite soit son âme, je lui aurais préféré une mort plus en phase avec ses crimes contre les Arabes et les Palestiniens, a ainsi lâché Waël Bou Faour, le ministre de la santé. Notre seule consolation est que Satan sera très heureux d’accueillir son homologue. »
A l’unisson de ses confrères libanais et à rebours de la presse occidentale, plus encline à mettre en valeur les aspects positifs du personnage, le quotidien Al-Charq Al-Awsat, propriété de la famille royale saoudienne, s’est concentré sur le côté « faucon » de M. Pérès. Il est qualifié dans les colonnes du journal de « père du projet nucléaire » en référence à son rôle dans l’acquisition par Israël de l’arme nucléaire ; de « héros de l’agression tripartite », une allusion à sa contribution à la piteuse attaque franco-anglo-israélienne de 1956, à Suez, contre l’Egypte de Nasser ; et, encore une fois, de « responsable du massacre de Cana ».
Sur les réseaux sociaux, les réactions sont encore plus nettement négatives. « Pérès a trompé les Arabes avec sa rhétorique de paix empoisonnée, qui a mis nos stupides leaders sur le chemin d’Oslo » – du nom du processus de paix signé en 1993 et entravé dès 1995 avec l’assassinat de Yitzhak Rabin, alors premier ministre –, a vitupéré sur Twitter Abdel Bari Atwan, un célèbre éditorialiste d’origine palestinienne.
Une vidéo qui a beaucoup circulé sur Facebook, postée par le site Middle East Panorama, montre une hajja (femme âgée) palestinienne, en robe traditionnelle brodée, en train d’éreinter Mahmoud Abbas, le président palestinien, pour s’être rendu aux funérailles à Jérusalem. « Honte à toi, tu n’es jamais allé aux funérailles d’un martyr et tu vas aux enterrements de ceux qui tuent tes enfants ? Est-ce qu’ils sont venus aux funérailles d’Abou Ammar [le surnom de Yasser Arafat, mort en 2004] ? Que tous les leaders arabes aillent au diable ! »
Dans L’Orient Le Jour, Leïla Chahid, l’ancienne ambassadrice de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) à Paris et à Bruxelles, apporte quelques nuances. « Abbas a eu le courage d’avoir défendu les accords d’Oslo jusqu’au bout, explique-t-elle. C’est l’œuvre de sa vie. Il est difficile pour lui de renier ce rêve de voir Pérès comme son partenaire de paix. Emotionnellement, il ne peut pas se dire que le processus de paix est mort, ça le tuerait. »
Aucune nouvelle de Riyad
Le dédain et la colère de la rue arabe tranchent avec le silence de la plupart de leurs dirigeants. L’agence de presse officielle saoudienne n’a publié aucun communiqué sur le sujet, alors que le royaume a fait quelques petits pas, ces derniers temps, en direction de l’Etat juif, en raison d’une aversion commune pour la République islamique d’Iran. Le compte Twitter du porte-parole du ministère des affaires étrangères égyptien est resté lui aussi muet, alors que le chef de la diplomatie égyptienne, Sameh Choukri, a participé à la cérémonie de Jérusalem.
Le roi Abdallah de Jordanie, qui entretient pourtant des relations diplomatiques avec Israël depuis 1994, s’est contenté d’envoyer une lettre de condoléances.
Ce profil bas s’explique par le fait que le rapprochement avec Israël, qu’il soit officiel, comme dans le cas de l’Egypte et de la Jordanie, ou plus secret et embryonnaire, comme dans le cas de l’Arabie saoudite et des Emirats arabes unis, reste très mal vu par les opinions publiques arabes.
Lire aussi : Le cercueil du Nobel de la paix Shimon Pérès mis en terre à Jérusalem
Hormis Mahmoud Abbas, le seul haut responsable arabe à s’être exprimé ouvertement sur la disparition de l’ancien Prix Nobel de la paix est le ministre des affaires étrangères du Bahreïn, Khaled Ben Ahmed Al-Khalifa. « Repose en paix, Pérès, homme de guerre et homme de la toujours insaisissable paix au Proche-Orient », a-t-il écrit sur Twitter. Une déclaration qui lui a valu, dans les minutes qui suivent, un flot de critiques indignées, en provenance de tout le Proche-Orient.
- Benjamin Barthe (Beyrouth, correspondant)
votre commentaire -
Attentat de janvier 2015: Hollande décore
les deux rescapés de l'imprimerie de
Dammartin-en-Goële
29/09/2016 à 11h34 LIEN
Lors de sa visite à Dammartin-en-Goële à l'occasion de l'inauguration
de l'imprimerie de Michel Catalano détruite le 9 janvier 2015, François
Hollande a décoré le chef d'entreprise retenu en otage par les frères Kouachi
ainsi que l'un de ses employés.
François Hollande s'est rendu à Dammartin-en-Goële, jeudi pour la réouverture de l'imprimerie détruite lors
de l'assaut contre les frères Kouachi en janvier 2015. Après l'inauguration d'une plaque commémorative par
le président de la République et le propriétaire de l'entreprise, Michel Catalano, ce dernier a fait visiter dans la matinée
les nouveaux locaux au chef de l'Etat.
"La barbarie ne me fera pas baisser la tête"
Lors de sa prise de parole, Michel Catalano s'est adressé directement à François Hollande:
"J'aurais préféré que vous ne soyez jamais venu à Dammartin." Il rappelle que "le hasard et la
folie de deux hommes ont fait que le 9 janvier 2015, je suis passé (...) du statut de chef d'entreprise
à celui de victime de terrorisme", avant d'affirmer que "la barbarie ne [le] fera pas baisser la tête".
C'est pourquoi au nom de ses salariés, en mémoire de son père, l'homme a décidé de reconstruire
son entreprise décrétant ainsi qu'il "ne laisserait pas deux terroristes décider de [sa] vie et de
[ses] choix."
"Moi Michel Catalano je suis fier d'être français"
Le chef d'entreprise a tenu à remercier tous ceux qui l'ont aidé ainsi que François Hollande d'avoir tenu
sa promesse de venir inaugurer son imprimerie. Le chef de l'Etat lui avait, en effet, rendu visite en février
2015 et dans l'anonymat le plus total.
Dans un contexte de tensions identitaires, Michel Catalano a tenu également à saluer la France: "A un
moment où l'on parle identité nationale, couleur de peau, ancêtres, religions, moi Michel Catalano je
suis fier d'être français et je n'oublie pas que mes parents sont nés en Italie".
En prenant la parole publiquement, Michel Catalano "souhaite redonner du courage à ceux qui
en manquent, l'envie de vivre à ceux qui ont été touchés d'une manière ou d'une autre, aux anonymes
et aux oubliés.
" Sur BFMTV, à la question de savoir ce qu'on peut lui souhaiter pour la suite, l'homme, qui a fait
d'importants investissements, répond: "du chiffre d'affaires et du repos".
Hollande remet deux légions d'honneur
Après s'être vu offrir une Marianne, dont le buste représente la fille "Marianne" de Michel Catalano, le
chef de l'Etat a rendu hommage au courage du chef d'entreprise et de Lilian Lepère, l'employé caché pendant
huit heures sous un évier de l'imprimerie, comme un "acte d'espérance et de volonté" face à la "barbarie".
"Je ne doute pas que beaucoup de Français et de personnes venues du monde entier voudront savoir:
'c'est où Dammartin? C'est où le fameux groupe Catalano?' C'est là où il y a des valeurs, là où il y a des
principes, des idéaux, de l'espoir, c'est là où s'est produit un drame, mais aussi une renaissance et donc
une espérance", a lancé François Hollande.
Le chef de l'Etat a ensuite remis la légion d'honneur à Michel Catalano et Lilian Lepère, "deux Français,
deux citoyens qui ont fait preuve du plus grand courage, courage dans les événements eux-mêmes,
courage après le drame".
Par Aurore Coulaud avec AFP
votre commentaire -
Ces tours de passe-passe qui ont permis de boucler le budget 2017
Michel Sapin et Christian Eckert à Bercy, le 16 mars 2016. (E. PIERMONT/AFP)Des baisses d'impôts, des embauches dans les ministères prioritaires et malgré tout, un déficit en baisse… Pour afficher un projet de loi de finances "sérieux", le gouvernement a procédé à quelques astuces comptables.
Donald HebertPublié le 29 septembre 2016 à 19h06Certains journalistes ont été surpris en découvrant le détail du projet de loi de finances 2017, que Michel Sapin, ministre des Finances, et Christian Eckert, secrétaire d'Etat au Budget, ont présenté mercredi 28 septembre. Depuis plusieurs semaines, nombre d'observateurs estimaient que le bouclage du dernier texte budgétaire du quinquennat était une équation impossible.
Notamment compte tenu des impératifs que s'est fixé le gouvernement : financer la lutte contre le terrorisme, embaucher dans l'éducation, la sécurité et la justice, soutenir l'emploi, réduire le déficit public à 2,7% du PIB l'année prochaine et ce, tout en baissant les impôts pour les ménages et les entreprises. Si Bercy réussissait à concilier ces impératifs, on trouverait forcément un loup dans le texte.
Prélèvement à la source, baisse d'impôts et déficit : Sapin défend son budget 2017
S'appuyant sur l'avis réservé du Haut conseil des finances publiques sur la prévision de croissance du gouvernement, les membres de l'opposition ont d'ailleurs usé des mots "insincère" (Christian Jacob), "bidon" (François Fillon), "salades" (Alain Juppé)… Et pourtant, il n'y a rien de caché. "Le gouvernement fait un peu de gonflette, mais il l'assume", reconnaît lui-même Gilles Carrez, président LR de la commission des Finances à l'Assemblée.
Budget 2017 : "Le gouvernement fait un peu de gonflette, mais il l'assume"
Outre quelques bonnes nouvelles, le gouvernement a simplement su profiter de montages comptables opportuns. Exemples.
Le coup du crédit d'impôt : 4 milliards d'euros
"L'Obs"vous a déjà expliqué le coup du crédit d'impôt compétitivité emploi, qui a permis à François Hollande de gagner 4 milliards d'euros, et que l'on retrouve dans ce projet de loi de finances. Le gouvernement avait promis une baisse de cotisations sociales pour les entreprises dans le cadre du Pacte de responsabilité. Le chef de l'Etat a décidé de le transformer en Crédit d'impôt compétitivité emploi, dont l'impact sur les finances publiques est décalé d'un an.
Comment Hollande a gagné 4 milliards d'euros d'un coup de crayon
Des prélèvements anticipés sur les entreprises : 520 millions d'euros
Remplir les caisses de l'Etat, rien de plus facile ! Il suffit de prendre l'argent où il est : dans les grandes entreprises. Et il n'y a même pas besoin d'augmenter les impôts. Les grands groupes versent l'impôt sur les bénéfices en plusieurs acomptes, et s'acquittent d'un certain pourcentage à chaque fois. L'administration n'a qu'à augmenter le pourcentage d'un des versements.
C'est un grand classique. En 2012, l'Etat avait ainsi récupéré 2 milliards d'euros. Cette fois, le gouvernement fait passer le pourcentage du dernier acompte de 75% à 80% pour les entreprises dont le chiffre d'affaires est compris entre 250 millions et 1 milliard d'euros, de 85% à 90% pour celles entre 1 et 5 milliards, de 95% à 98% au-delà. Quelques petits points de pourcentage en plus avant le 31 décembre, et le tour est joué : 520 millions d'euros en moins dans le déficit public !
Des prélèvements anticipés ailleurs : 680 millions d'euros
La beauté de cette mesure, c'est qu'elle "n'a pas d'impact sur le résultat comptable des entreprises concernées, qui enregistraient déjà l'impôt dû l'année d'exercice", explique Bercy. Tout au plus, elle ponctionne leur trésorerie. Mais les grands groupes français n'en manquent pas. Notamment parce qu'ils touchent le crédit d'impôt compétitivité emploi que l'Etat leur verse ! Mieux, cette trésorerie est parfois coûteuse, puisque les taux d'intérêts sont négatifs à certaines échéances !
Sur le même modèle, le gouvernement avance le prélèvement sur l'épargne (380 millions d'euros), sur les surfaces commerciales (100 millions d'euros), sur les véhicules de société (200 millions d'euros). La magie de la comptabilité !
De "bonnes nouvelles" : 4 milliards d'euros
Comme le dit le texte du discours de Christian Eckert :
"N'en déplaise aux chats noirs, les bonnes nouvelles existent aussi quand on fait un budget !"
Le secrétaire d'Etat au Budget liste la baisse des risques de dépenses de certains contentieux fiscaux, la baisse des taux d'intérêts, une hausse des recettes du rapatriement des comptes depuis la Suisse notamment. Et voilà 4 milliards d'euros !
Une réforme de la garantie des exports : 4 milliards d'euros
Autre bonne nouvelle, cette fois moins bien détaillée par les ministres : la réforme des garanties à l'export. Jusqu'ici, c'était la Coface qui assurait cette fonction auprès des entreprises françaises pour leurs opérations à l'étranger, notamment dans des pays à risque. Désormais, ce sera la Banque publique d'investissement. Or, la Coface avait reçu une somme de l'Etat pour garantir ces opérations, qu'elle doit lui rembourser. Gain pour les finances publiques l'année prochaine : de nouveau, 4 milliards d'euros !
Donald Hebert
Journaliste
votre commentaire
Suivre le flux RSS des articles
Suivre le flux RSS des commentaires